
Comment est née votre vocation ?
A.V. : Adolescent, je voulais être inventeur ou aventurier. J'adorais dessiner, des avions, des voitures... J'ai même gagné un concours de dessin organisé par Mercedes. J'inventais des engins, comme des petits bateaux, des overcrafts, j'aimais comprendre leur fonctionnement. J'ai choisi l'architecture car pour moi un architecte c'était avant tout un ingénieur. J'ai découvert à l'école les autres aspects du métier, la créativité, la sociologie, cela m'a passionné.
Qu'est-ce qui a déterminé l'orientation de votre travail, vers la rénovation d'immeubles pour l'un, vers l'habitat individuel pour l'autre.
A.V. : Au départ, j'ai travaillé pour de grandes agences, comme beaucoup de mes copains. Nous étions les petites mains, on dessinait les projets pour les concours. Un jour un ami m'a demandé de dessiner sa maison. J'ai hésité, car ma spécialité c'était plutôt les collèges, les piscines ou les grands collectifs ! J'ai fini par accepter et cela m'a plu. Ensuite j'ai créé une structure avec 2 amis, mais le marché était verrouillé par les grosses agences. On a alors décidé d'être nos propres promoteurs. Ayant trouvé un terrain par hasard, une dent creuse en ville, j'ai décidé d'y construire ma maison, comme je l'entendais. En 2002, le marché de l'habitat sur Lille était ultra-traditionnel, en briques et tuiles. Nous, on a fait une maison très moderne, à ossature bois avec une façade tout en panneaux noirs et en verre, en faisant abstraction de tous les a-priori et les codes esthétiques. Ce projet a été un pavé dans la marre et a lancé ma carrière.
Comment concevez-vous votre métier d'architecte ? Quelles sont vos priorités ?
A.V. : Pour moi, être architecte, c'est un travail d'aiguillage. On n'est pas là pour imposer, sinon cela donne un projet froid, impersonnel. Cela doit découler d'un dialogue avec le client. Ma priorité, c'est l'écoute. Bien sûr, si certaines demandes nous paraissent aberrantes, on va faire le tri, proposer d'autres solutions. Quand ce travail est bien fait, on ne fait qu'une esquisse et c'est la bonne. Voilà pour le programme. Ensuite, j'attache beaucoup d'importance à l'esthétique. Il faut que ce soit élégant, bien dessiné.
Pouvez-vous illustrer votre propos par un ou deux projets, dont vous êtes particulièrement fiers ?

Cela nous amène à l'injonction de sobriété, qui est dans tous les esprits. Est-ce une contrainte ou une opportunité ?
A.V. : Je crois aussi que l'avenir du métier d'architecte, c'est la rénovation, l'agrandissement et le réaménagement de bâtiments. Notre agence a de plus en plus de projets de rénovation d'habitat individuel. C'est logique car dans ma région, le Nord, il y a moins de terrains disponibles, faire construire devient inaccessible pour beaucoup de gens. La sobriété, c'est savoir faire des bâtiments compacts. Les architectes ont ça dans le sang. N'ayant pas les moyens et la puissance de frappe d'un constructeur, pour décrocher un projet, on doit faire la chasse à la place perdue pour faire des économies. De même, on évite de mettre de l'or dans nos façades, l'essentiel est dans la ligne, l'allure générale du bâtiment. La sobriété, ce n'est pas un souci. Les contraintes, ce sont les procédures administratives, la réglementation et les normes, qui sont parfois aberrantes.
Que retenez-vous de votre expérience de juré du Palmarès Architecture Aluminium Technal 2020-2021 ?
A.V. : L'intérêt de ce concours, c'est qu'il est ouvert aux gros cabinets comme aux tout petits. J'ai beaucoup aimé le projet de réhabilitation d'une halle industrielle, La Cité à Toulouse, la réponse était pertinente. Il y a aussi ce jeune qui s'est fait sa propre maison-atelier, dans une dent creuse au centre de Lille, exactement comme moi à mes débuts. Cela m'a rappelé des souvenirs et aussi qu'il faut toujours oser, croire en ce qu'on fait et ne pas trop écouter l'avis des autres.
O.D. : J'ai adoré cette expérience qui réunissait des jurés de spécialités différentes, c'était très enrichissant. J'ai apprécié que chaque projet soit présenté à l'aveugle, sans qu'on sache qui l'a fait, où il est situé. Avec le recul, je m'aperçois que la sobriété n'était pas au centre de nos discussions. C'est esthétique, l'insertion paysagère qui ont primé. C'était en 2021, cela paraît loin... La crise énergétique et des matériaux, un été de canicule sont passés par là. Le prochain Palmarès témoignera sûrement des évolutions qu'on vient d'évoquer.
> Voir les lauréats du Palmarès Architecture Aluminium Technal 2020/2021
